ZANZIBAR

ZANZIBAR
ZANZIBAR

Simple petite île corallienne, basse et pluvieuse, au large des côtes de l’actuelle Tanzanie, ne couvrant que 1 658 kilomètres carrés, Zanzibar a joué, dans l’histoire, un rôle essentiel comme centre de la thalassocratie omanaise, comme carrefour entre le continent africain, l’océan Indien, l’Arabie et l’Orient, et comme foyer de rayonnement culturel arabo-islamique. Trois éléments ont fortement influencé son histoire: le jeu des moussons permettant des navigations alternées aisées avec le nord-ouest de l’océan Indien; les facilités portuaires et l’étroite proximité du continent noir; la formation d’une langue et d’une culture originales, le swahili.

Zanzibar, centre de l’empire omanais

Sur la côte de Zandj, comme ils la nomment, les Arabes enracinèrent à partir du Xe siècle des comptoirs commerciaux qui furent actifs durant tout le Moyen Âge dans les relations de l’Afrique de l’Est tant avec le monde arabo-persan du Nord-Est qu’avec l’ensemble indonésien ou chinois de l’Est. Ils entraînèrent l’établissement de quelques Arabes et de quelques Perses (Chirazi).

L’installation des Portugais au XVIe siècle laissa subsister nombre de ces villes-États dans des rapports complexes de suzeraineté, d’hostilité ou de collaboration. Zanzibar entre véritablement dans l’histoire, comme entité, avec sa reconquête par les Omanais (du sud de l’Arabie) en 1698. La suzeraineté de l’im m de Mascate-Oman demeure cependant lointaine, s’exerçant par l’intermédiaire de quelques descendants arabes locaux et d’une poignée d’émigrés d’Oman. La situation se modifie au début du XIXe siècle avec la création d’un véritable empire omanais arabo-africain et l’élévation de Zanzibar au rang de capitale de cet empire.

L’île avait reconnu l’autorité de Sayid Saïd, im m de Mascate (1804-1856) dès son avènement. De 1828 à 1832, le souverain s’intéresse de plus en plus à ses territoires africains, étend son pouvoir le long de la côte et dans l’intérieur. Il fait construire en 1832 un palais à Zanzibar, où il séjourne fréquemment, en faisant, à partir de 1840, sa véritable capitale. Elle conservera ce rôle jusqu’en 1856. À la mort de Sayid Saïd, ses possessions furent divisées entre ses deux fils, Thawanyi, qui eut le gouvernement d’Oman, et Majid, à qui revint celui de Zanzibar. Les deux royaumes furent définitivement séparés en avril 1861, Zanzibar continuant toutefois à payer un tribut annuel à Mascate. Celui-ci ne fut versé que jusqu’en 1866 et fut officiellement supprimé après 1870. L’unité politique était rompue. Mais les liens humains, économiques et culturels survécurent à la dislocation de l’empire de Sayid Saïd.

La période de la plus grande prospérité de Zanzibar tient dans le demi-siècle qui va des années 1820 aux années 1870. Elle est fondée sur une triple activité. Zanzibar est d’abord centre politique et diplomatique avec l’installation du premier consulat, celui des États-Unis, en 1836. Des représentants du sultan contrôlent la région côtière de Mogadishu, au nord, à Safala, au sud, et s’enfoncent loin vers l’intérieur, où s’affirme l’islamisation. Zanzibar est devenu un actif foyer de rayonnement de l’islam. Les lettrés, notamment ceux des Comores, viennent s’y former. Des cadis sont appelés d’Oman et sont au centre des petites communautés arabes de l’intérieur (Tabora, Ujiji), zones d’islamisation et relais du trafic caravanier. C’est, en effet, la deuxième fonction de Zanzibar que d’être entrepôt maritime et centre de redistribution commercial de l’empire omano-africain. Les navires sous le pavillon rouge de l’im m mais aussi, et de plus en plus, les bâtiments européens assument le commerce de redistribution. Le grand commerce met en jeu dans la période 1852-1857 une moyenne annuelle de 150 navires européens (40 000 tonneaux) et de 600 navires arabes (25 000 tonneaux). Dans ce commerce, une place importante doit être faite aux exportations d’esclaves, particulièrement actives au milieu du siècle (une quinzaine de milliers par an) qui, bien qu’en forte diminution à partir des années 1870 (interdiction de 1873), se maintiennent jusqu’à la fin du siècle (suppression de l’esclavage en 1897).

Enfin, Zanzibar et l’île sœur de Pemba deviennent, à partir de 1830, les principaux producteurs de clous de girofle. Les plantations de girofliers prirent une énorme extension, avec une progression parallèle de la population d’esclaves: 144 tonnes furent exportées en 1840, 480 en 1844, 2 050 en 1853, 2 285 en 1856 et 5 472 en 1865.

Ces différentes activités politiques, administratives, culturelles, maritimes, agricoles, commerciales entrelacées avaient attiré une population composite d’Arabes, d’Indiens, d’Européens, d’Africains, de Comoriens... La population de la ville de Zanzibar passe de quelque 5 000 habitants en 1819 à 12 000 en 1835, et à près de 50 000 aux alentours de 1865. La première estimation indiquera pour les deux îles vers 1893 quelque 200 000 habitants, dont 9 000 Arabes et 7 500 Indiens.

Zanzibar colonial

L’occupation allemande de la côte orientale de l’Afrique amorçait le dépècement du sultanat. En décembre 1885, une commission des représentants de l’Allemagne, de la France et de la Grande-Bretagne était formée «pour travailler à la délimitation des territoires du sultanat de Zanzibar». L’accord anglo-allemand du 9 octobre 1886 limitait les possessions du sultan aux deux îles, à une bande côtière continentale de Tingui au sud à Tana au nord et, au-delà, aux villes de Kismayu, Brava, Merca, Mogadishu et Warsciek. C’était la fin de la suzeraineté de Zanzibar sur l’intérieur partagé entre les deux puissances. En décembre 1886, le sultan Bargasch était contraint d’accepter tous les termes de cet accord de partage. Le domaine zanzibarite était non seulement démantelé mais directement menacé. Le traité anglo-allemand de 1890 remettait Heligoland à l’Allemagne contre la reconnaissance de la prépondérance britannique à Zanzibar qu’admettait également le traité anglo-français de la même année. Le 4 novembre 1890, le protectorat britannique sur Zanzibar était officiellement proclamé. Le Foreign Office en sera responsable jusqu’en 1913. Il passera alors au Colonial Office. En 1895, l’essentiel de la bande côtière (Coastal Strip) comprenant Mombasa était enlevé au protectorat pour être rattaché au Kenya bien que le sultan en conservât la suzeraineté théorique. Enfin, les possessions continentales du Nord passaient sous l’autorité de l’Italie, d’abord par l’intermédiaire des entreprises commerciales et politiques de Vincenzo Filonardi, puis comme protectorat officiel, enfin comme colonie italienne de Somali, au nord de la rivière Juba avec comme capitale la ville de Mogadishu. Ainsi disparaissait, par la création de ces trois installations européennes, le domaine africain zanzibarite.

La domination britannique allait durer quelque soixante-dix ans. Lorsque l’ancienne Afrique orientale allemande devient mandat britannique en 1919-1920, le «sultanat et protectorat britannique de l’Est africain» subsiste comme entité administrative comprenant les îles de Zanzibar et de Pemba, quelques îlots adjacents et la souveraineté nominale sur un morceau de côte africaine de 10 miles de profondeur, le tout sous l’autorité d’un haut-commissaire. Ce dernier poste fut aboli en 1925, le résident britannique à Zanzibar dépendant alors directement du Colonial Office, cependant qu’étaient créés localement un conseil exécutif et une commission législative. Ce statut de protectorat et d’autonomie perdura, sans grandes modifications, jusqu’en septembre 1956 où fut créé un conseil privé, où fut remanié le Conseil exécutif ainsi que la Commission législative, qui passait de 26 membres (dont 12 élus) à 32 membres (dont 18 élus) en mai 1957.

Les premières élections eurent lieu en juillet 1957: les années suivantes, la vie politique fut, dans la perspective de l’indépendance, marquée par des affrontements ethniques et sociaux, la population d’origine africaine craignant, avec l’indépendance totale, le renforcement de la supériorité de la minorité socialement et économiquement dominante des Arabes. Elle soutenait l’Afro-Shirazi Party (A.S.P.). Les Arabes animaient le Zanzibar Nationalist Party (Z.N.P.) qui s’affirmait plus fortement antibritannique.

Aux élections de juillet 1961, l’A.S.P., bien qu’il ait eu plus de voix (54 p. 100), obtenait moins de sièges au Parlement. Il provoqua de sanglantes émeutes sans pouvoir ébranler le pouvoir arabe confirmé aux élections de 1963. C’est dans ce climat de troubles qu’allait advenir l’indépendance. Pendant la période britannique, l’économie était restée dominée par la production des clous de girofle dont les îles demeuraient, de loin, le premier producteur mondial (jusqu’à 80 p. 100); l’irrégularité des récoltes et la grande variation des prix incitèrent à diversifier les cultures, coprah, riz, sucre. La population s’accrût rapidement avec une forte poussée des éléments indiens.

L’indépendance et l’union avec la Tanzanie

En décembre 1963, la Grande-Bretagne accordait l’indépendance à Zanzibar au sein du Commonwealth. Appuyé par les forces conservatrices et arabes, le Premier ministre Mohamed Shambtu Hamadi se heurta d’emblée à l’opposition du prolétariat africain de l’Afro-Shirazi Party. Son chef, le cheikh Karume, exploitant le mécontentement populaire, déposa le sultan Saïd Jamshid et proclama la République dans une insurrection courte mais sanglante, qui fit quelque 10 000 victimes arabes (janv. 1964). Devenu président de la République, Karume, en mars 1964 (accord de Dar es-Salam), fondait l’ancien protectorat avec le Tanganyika dans la «république unie du Tanganyika et de Zanzibar» présidée par Nyerere, l’ensemble prenant bientôt le nom de Tanzanie.

L’orientation communiste de Zanzibar s’affirma dès les premiers jours de la révolution anti-arabe. L’autonomie intérieure de Zanzibar fut maintenue dans une atmosphère politique troublée et au milieu de graves difficultés économiques. La révolution des «Jacobins noirs» fut radicale: nationalisation et redistribution des grands domaines arabes de l’archipel ainsi que du commerce de détail, remplacement des tribunaux par des cours populaires, expulsion des Arabes et des Indiens, liens privilégiés avec la Chine maoïste. L’assassinat de Karume, en avril 1972, et l’arrivée au pouvoir d’Aboud Jumbi marquèrent une inflexion vers une politique plus modérée, mais aussi une fusion plus étroite avec l’ensemble tanzanien. Au début de 1977, l’unité fut renforcée par la fusion de la T.A.N.U., parti unique de la Tanzanie, avec le parti unique de Zanzibar, l’A.S.P., dans une seule formation, le Chama Cha Mapinduzi (C.C.M.) ou Parti de la révolution en swahili.

L’Assemblée nationale tanzanienne adopta une nouvelle Constitution le 25 avril 1977, entérinant la suprématie du parti présidé par Nyerere, maintenant deux gouvernements, un pour les territoires continentaux et un pour les îles de Zanzibar et de Pemba; le nombre des sièges à l’Assemblée passa de 96 à 106, de manière à admettre pour Zanzibar dix nouveaux députés élus aux élections générales. C’était la première fois que les Zanzibarites avaient l’occasion d’aller aux urnes depuis la révolution de 1964. En droit comme en fait, cette nouvelle Constitution ne maintenait que la fiction de l’autonomie de Zanzibar qui désormais était définitivement rattaché à l’ensemble tanzanien.

Le temps n’était plus où, suivant le dicton arabe, «lorsqu’on jouait de la flûte à Zanzibar, toute l’Afrique, jusqu’aux grands lacs, dansait». Les fastes de Zanzibar se sont définitivement évanouis. Il en demeure néanmoins quelques reflets dans l’architecture de la ville, dans les traditions et le rôle culturel de l’île ainsi que dans l’imaginaire populaire.

Dissentiments

En 1992, le multipartisme est adopté en Tanzanie et un nouveau mouvement acquiert une notable audience, le Kamahuru, qui réclame la sécession de Zanzibar d’avec le continent. Dans le même temps, un clivage grandit dans l’île entre chrétiens et musulmans, à l’occasion de l’adhésion, en janvier 1993, de Zanzibar à l’Organisation de la conférence islamique.

zanzi [ zɑ̃zi ] n. m.
• 1896; abrév. de zanzibar, même sens (1884), du nom de l'île d'Afrique orientale (rapport inexpliqué)
Jeu de dés qui se joue ordinairement à trois dés.

zanzibar ou zanzi nom masculin (de Zanzibar, nom propre) Jeu de hasard qui se joue avec trois dés à deux joueurs ou plus. Jet des dés amenant trois points identiques et constituant le tirage le plus fort à ce jeu.

Zanzibar
île corallienne du littoral africain de l'océan Indien, faisant partie de l'état de Tanzanie; 1 658 km²; 479 000 hab. (musulmans sunnites, en majorité, parlant le swahili); cap. Zanzibar. Production d'épices (1er producteur mondial de clous et d'huile de girofle) et de coprah.
Depuis toujours, Zanzibar a été une place de commerce importante vers l'Asie; place forte portugaise de 1503 à 1730, puis sultanat arabe, Zanzibar devint un protectorat britannique (1890), qui obtint son indépendance en 1963. En janv. 1964, un mouvement révolutionnaire renversa le sultan et instaura la république; la pop. arabe fut victime de massacres. Deux mois plus tard, Zanzibar fusionnait avec le Tanganyika pour former la Tanzanie.
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Zanzibar
v. de Tanzanie, cap. de l'île Zanzibar; 160 000 hab. Port de pêche et de comm. Conserveries, distilleries.
Monuments anciens: mosquées, palais du sultan.

⇒ZANZIBAR, ZANZI, subst. masc.
A. — Jeu de dés, qui se joue ordinairement à trois dés. Jeu, partie de zanzibar; jouer au zanzibar. C'était un ignoble bouge, une petite salle avec (...) un comptoir en zinc, un jeu de zanzibar, et des brocs violets (HUYSMANS, Là-bas, t. 2, 1891, p. 169). Des divertissements de société, belote, jacquet, zanzi, billard (ARNOUX, Gentilsh. ceinture, 1928, p. 140).
P. méton. Les trois dés et le cornet servant à jouer à ce jeu. (Dict. XIXe et XXe s.). [Expr. prononcée au cours du jeu] Pour gagner la partie et annoncer victorieusement « zanzi », il faut sortir trois dés accusant le même point (SANDRY-CARR. Jeux 1963).
B. — CHIMIE
1. ,,Variété de caoutchouc brut d'Afrique`` (DUVAL 1959).
2. (Copal de) zanzibar. Variété la plus dure de résine fossile, utilisée dans la préparation des vernis, insoluble dans les carbures, les cétones, les esters (d'apr. DUVAL 1959). Copal africain (...) On trouve des morceaux de zanzibar transparents et incolores comme du verre (COFFIGNIER, Manuel peintre, 1925, p. 183).
Prononc.:[], []. Étymol. et Hist. 1884 arg. des voyous d'apr. ESN.; 1891 un jeu de zanzibar (HUYSMANS, loc. cit.); p. abrév. zanzib (Paul PAILLETTE, Tablettes d'un lézard ds FRANCE 1907); 1896 zanzi (DELESALLE, Dict., 307 ds NOUGUIER, Notes manuscr. Dict. Delesalle, 1900, p. 307). Du nom de Zanzibar, port et île d'Afrique orientale, sans que le rapport soit élucidé (cf. FEW t. 20, p. 89b).

zanzibar [zɑ̃zibaʀ] n. m.
ÉTYM. 1884, « argot des voyous » (Esnault); nom d'un port et d'une île d'Afrique orientale; rapport inexpliqué.
Vieilli (on dit plutôt zanzi). Jeu de dés, qui se joue ordinairement à trois dés. || Une partie de zanzibar (→ Proposer, cit. 3).
0 (…) un ignoble bouge, une petite salle avec des tables et des bancs de bois, un comptoir en zinc, un jeu de zanzibar (…)
Huysmans, Là-bas, XIX.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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